LES EVOLUTIONS DE LA MODE PERIODES DE 1960 à 1980 LES ANNEES 1960-1970
La révolution était en marche à la fin des années 60, ouvrant les possibilités de mutation des années 70. Les femmes, les modes, les contestations, les crises monétaires et pétrolières, les chocs politiques des années 70 transforment les conceptions du monde. De l'informatique aux valeurs esthétiques, tous les domaines connaissent alors des évolutions multiples. La mode, ne pouvant par définition échapper à l'emprise de son temps, révèle ces transformations majeures tant par de nouvelles organisations institutionnelles et commerciales que par l'explosion stylistique provoquée par la naissance des "créateurs".
I - DE NOUVEAUX TALENTS DE MODE : LES
CREATEURS
Si le développement du prêt-à-porter de style dans les années 60
a permis l'apparition des stylistes, les années 70 ont vu
l'éclosion des "créateurs" qui peuvent enfin signer leur création et les
vendre sous leur griffe. Sous l'impulsion de Didier Grumbach,
la structure "Créateurs et Industriels" aide ces nouveaux talents dans la
fabrication en série de leurs modèles : Issey Miyake, Jean-Charles de Castelbajac lance
une collection en toile de jute et serpillière ou des tissus couverture. Avec eux, Michel
Klein, Christiane Bailly, Adeline André, Emmanuelle Khanh forment ainsi la première
génération de créateurs.
Par ailleurs, en 1970, Kenzo présente pour la première fois une
nouvelle mode avec ses coupes plates et ses fleurs colorées. En 1974, Anne-Marie Beretta
lance la robe-sarrau en flanelle de santé. En 1975 Agnès b. ouvre ses portes et propose
des vêtements de style déjà porté, Chantal Thomass crée les premières blouses
transparentes, de réminiscences victoriennes, et Sonia Rykiel conçoit une mode qu'elle
imaginait pour elle-même avec ses tricots bord à bord cousus l'envers sur l'endroit...
Claude Montana avec ses cuirs et paddings, Thierry Mugler en 1977 et Jean Paul Gaultier en
1979 formeront la seconde génération de créateurs et participeront à placer les
années 80 sous le signe des fastes de la mode en organisant des défilés spectacles.
Vers la fin des années 70, certains créateurs comme Popy Moreni et Elisabeth de
Sennevile offriront une mode acidulée, mêlant créativité et technologie avec, par
exemple, des couleurs électriques pour des sandales en
plastique ou des plastiques fluos graphiques.
Par ailleurs cette explosion de créateurs a engendré une multitude
de styles très différents. Ce mouvement a eu un écho important à une époque où la
mode n'est plus à suivre mais doit s'inventer en fonction de chaque individu.
II - L'EXPLOSION DES STYLES PERSONNELS
Les années 1970-80 voient l'explosion des styles personnels et
valorisent l'innovation individuelle dans tous les domaines dont l'habillement. Il s'agit
d'une époque d'incertitude, où tout devient permis et pendant laquelle les expériences
se multiplient. La mode, ludique ou engagée en forme de protestation, ouvre de nombreux
champs d'investigations.
Après la naissance des styles et avec le
développement de la grande distribution, chacun peut composer ses propres mélanges: la
mode est à la personnalisation du style. On voit apparaître
l'accessoirisation à outrance,
alors perçue comme jeu personnel, de pièces vestimentaires basiques.
Les diktats sur la longueur des jupes et
robes n'ont plus de raison d'être : on passe sans difficulté du maxi au mini, puisque
c'est la femme qui choisit et non plus la mode.
La jeunesse qui avait participé au grand déploiement du
prêt-à-porter dans les années 60, va refuser en bloc les
produits fabriqués en grande série. Souhaitant innover tout en se démarquant de ses
aînés, elle va se diriger davantage vers des produits détournés ou acquis de seconde
main au marché aux puces ou ramenés de voyage à
l'étranger. Ces jeunes qui avaient porté les vêtements du futur dans les années 60
vont se retourner vers le passé et les provinces dans les années 70.
Des circuits parallèles de vente de produits exotiques s'organisent
et fournissent à cette jeunesse des moyens de se vêtir de manière personnelle et
distincte. Sa mode favorisera les savants mélanges de cultures. Les greniers des
grand-mères, les surplus de l'armée américaine génèrent la "fringue",
vêtement résidu ou détourné. C'est la vague du kaki, de la saharienne.
Ces mélanges hétéroclites lanceront le "kitsch". La tendance rétro est alors à son comble.Daniel Hechter valorise
l'innovation personnelle en proposant les jeux qui se rapportent aux nouveaux coordonnées
UNE MODE ENGAGEE
En signe de protestation, on réutilise les vêtements militaires qui sont alors
détournés... Par solidarité avec les ouvriers, on réutilise les vêtements de travail.
C'est le port de la salopette et de la veste de travail qui sera le plus développé. Pour
réagir contre le stress et la pollution, c'est le développement
des survêtements et du sportswear. Le jean devient universel
et se décline sous toutes ces formes : brodé illustré,
teint, ou classique avec un foulard Hermès. Les tee-shirts deviennent des moyens de
communication : on y voit inscrit des slogans ou des fantasmes de super-héros, on y
trouve aussi ses propres questions.
Durant cette décennie, le rôle des femmes est prépondérant et le militantisme
collectif prend un essor nouveau. Dans le cadre d'une mode de
plus en plus unisexe,les ventes de robes et de jupes
diminuent au profit d'un pantalon spécifiquement coupé pour
les femmes. Le pantalon se porte avec une tunique, une veste,
ou d'autres hauts permettant à toutes les femmes de porter le type de pantalon qui leur
convient.... Le pantalon sera aussi raccourci et donnera un effet remarqué avec les
manteaux maxi. La première tentative de collection unisexe date de 1970. On la doit à
Jacques Esterel qui crée aussi bien des ensembles pantalons que des robes chemises pour
hommes.
Par ailleurs, la fin de la décennie est marquée par un retour au
réalisme, exprimé par une esthétique franche. Le mouvement punk en est une illustration
frappante en utilisant des objets détournés et en siglant ses vêtements d'insignes
politiques provocateurs. Provoquer en bravant les tabous devient un leit-motiv
vestimentaire.
Ainsi s'opposent deux visions dans la mode comme en art : le retour à la nature, à l'artisanat et au romantisme face à la dénonciation d'une réalité des plus crues. Ces nouvelles formes de beauté créent des perceptions esthétiques différentes et marquent les divergences de conceptions de la société. De manière concomitante, alors que la rue innove dans tous les sens, la profession de l'Habillement s'organise et crée de nouvelle structures institutionnelles encadrant les nouveaux talents de mode.
III - UNE NOUVELLE ORGANISATION INSTITUTIONNELLE ET COMMERCIALE DU SECTEUR
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LINDA LOPPA Directrice de la section "Mode" de l'Académie des Beaux Arts d'Anvers Quelles sont selon vous les sources d'inspiration des jeunes créateurs belges? Leurs sources d'inspiration sont la rue, le cinéma, la musique, les actrices et les acteurs de cinéma, la littérature, l'actualité, l'histoire de l'art, l'histoire de la mode, les peuples du monde entier, les artistes, etc... Quelles sont les matières privilégiées par la nouvelle génération de créateurs? Les matières sont très diverses : cela va des matières très classiques à des matières non tissées, très brutes. Quelle est la place de la Belgique dans la mode? Je trouve que les jeunes créateurs belges sont assez proches des créateurs anglais. Quant à l'Académie, elle pourrait devenir le centre de la création européenne en matière de mode. Paris, Londres ou Milan resteront les villes des défilés de prestige et le glamour de la mode continuera de régner. Suivant les travaux que vous proposent les étudiants actuels, comment imaginez-vous la mode de demain...? L'année 2000 et la fin de siècle pèsent sur les jeunes, ils trouvent que le monde politisé est corrompu. Les jeunes sont stimulés par ce monde décalé et ils crachent leurs idées. Cela les rend plus créatifs que jamais. |